Textes pour la rencontre du groupe 5 des AMZ Canada
le samedi 28 août 2021 10h
Quelques citations de Maurice Zundel
- Il y a en moi plus grand que moi. (…) Qu’importe le nom qu’on lui donne, c’est une présence infinie qui me dépasse infiniment et qui est plus proche à moi-même que moi-même.
- Un homme qui a le pressentiment de l’infini dans l’homme … est embarqué dans une aventure spirituelle qui pourra le conduire jusqu’à la plus haute mystique. S’il ne perçoit pas cet infini, il est comme mort.
- Nous ne nous connaissons nous-mêmes que lorsque nous cessons de nous regarder.
- Dieu ne se définit pas, Dieu s’expérimente quand nous décollons de nous-même.
- Dieu c’est quant on s’émerveille.
Texte de Maurice Zundel
Préface du livre « Je est un autre »
L’enfant qui arrive à faire cette découverte extraordinaire qui s’exprime en un mot : j’existe, pourrait ajouter aussitôt : mais je n’y suis pour rien. Le pronom personnel auquel il recourt, le « je » qui précède ici le verbe exister, n’est cautionné par aucune initiative qui lui serait propre. Il ne tient rien de soi, en effet, il est entièrement préfabriqué et il ne subsiste que par la vertu des énergies fournies par l’univers qui le porte.
Selon le cours ordinaire des choses, il en restera là. Il continuera à dire « je et moi » sur un être qu’il subit et avec lequel il s’identifie avec une complicité inconsciente, dont les racines sont affectives et passionnelles. Il deviendra homme au sens zoologique d’appartenance à l’espèce humaine, en s’attachant âprement à soi, comme font tous les vivants à quelque espèce qu’ils appartiennent. Sa complexité physique et psychique ne suffira pas à le faire émerger d’un monde instinctif et à lui assurer une situation transcendante.
Et cependant, si l’on tente de l’asservir, si l’on prétend le réduire à un rôle de pur instrument, s’il est soumis à un régime concentrationnaire, s’il est condamné à subir tous les raffinements d’un lavage de cerveau, il prendra conscience de sa dignité comme de son bien le plus précieux à travers l’indignité même des traitements dont il est l’objet.
C’est par-là que commencera à se faire jour en lui sa dimension proprement humaine et sa vocation d’en réaliser toute l’exigence.
Une dignité inviolable, c’est bien ce qui fonde les droits de l’homme. Mais cette dignité n’est pas donnée avec sa naissance charnelle : il s’agit pour lui de la conquérir dans un continuel dépassement de ses préfabrications. L’homme authentique est toujours en avant de lui-même, dans ce sens qu’il n’atteint réellement à soi qu’en actualisant les possibilités d’une grandeur qui doit être son oeuvre.
Dans cette perspective on peut résumer la condition humaine dans cette formule, qui est pour moi la suprême évidence : je ne suis pas, mais je puis être.
On verra, dans les pages qui suivent comment cette sorte de cogito me semble trouver dans la révélation chrétienne sa plus éminente caution.
Les aspects de cette révélation envisagés dans ces conférences, données sur l’invitation de Son Ex. Mgr Grégoire Haddad durant l’hiver 1968-1969, répondent à la demande des Amis beyrouthins qui ont choisi les titres de ces entretiens avec un sens aigu des problèmes qu’ils soulèvent et qui ont pris à cœur de leur assurer l’auditoire le plus attentif et le plus exigeant.
Beyrouth, avril 1969, Lausanne, février 1971
Texte du Prologue de l’évangile de St. Jean
01 AU COMMENCEMENT était le Verbe, et le Verbe était auprès de Dieu, et le Verbe était Dieu.
02 Il était au commencement auprès de Dieu.
03 C’est par lui que tout est venu à l’existence, et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui.
04 En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ;
05 la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée.
06 Il y eut un homme envoyé par Dieu ; son nom était Jean.
07 Il est venu comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière, afin que tous croient par lui.
08 Cet homme n’était pas la Lumière, mais il était là pour rendre témoignage à la Lumière.
09 Le Verbe était la vraie Lumière, qui éclaire tout homme en venant dans le monde.
10 Il était dans le monde, et le monde était venu par lui à l’existence, mais le monde ne l’a pas reconnu.
11 Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu.
12 Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu, eux qui croient en son nom.
13 Ils ne sont pas nés du sang, ni d’une volonté charnelle, ni d’une volonté d’homme : ils sont nés de Dieu.
14 Et le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, la gloire qu’il tient de son Père comme Fils unique, plein de grâce et de vérité.
Pour tenter de faciliter l’amorce de votre réflexion
Identifiez un moment de notre vie où vous vous êtes sentis bafoués dans notre dignité.
Essayez d’identifier le « je » et « l’autre » et les traits qui caractérisent chacun durant ce moment.
Quelle lumière vous est apparue lors de cette expérience ?
En quoi vous a-t-elle changé dans vos comportements à l’égard de vous-même et des autres ?
Texte complémentaire extrait du livre superbe « Vivre avec nos morts » de Delphine Horvilleur, Grasset, Paris, 2021. (Superbe !) Rabbin du Judaïsme en Mouvement (pages 132 et 133) – voir aussi Gn 25.