Naître à la Présence (III)

Une retraite annuelle organisée par les amis de Maurice Zundel au Canada à l’Ermitage Sainte-Croix à Pierrefonds les 23-25 août 2019.

3ième étape: En communion par et dans l’esprit

Visitation – Fraternité Magnificat

Introduction  Fr. Darbois  Thèse page  99 :

Le lien substantiel[1]entre la pensée et l’Esprit

  Pour Zundel, «l’Occident a chosifié la pensée, … il a matérialisé l’intelligence, en perdant du même coup le sens de la contemplation.»[2]Dès le XIVe siècle, la philosophie, en perdant de vue l’intériorité, n’a pas su distinguer connaissance sensible et connaissance intellectuelle, elle a perdu ce lien substantiel[3]entre la pensée et l’Esprit. «La grande tragédie de l’Occident, c’est que l’intelligence chez lui, s’est retournée contre l’Esprit, en se détournant de son intériorité, en perdant le sens de la contemplation, en oubliant qu’autant que l’art, le savoir est un secret d’amour qui nous veut attentifs à la présence qui vêt toute chose de lumière et de beauté.»[4][…]

    Zundel cherche à mettre à nu «l’hérésie fondamentale qui confond la raison technique avec l’intelligence, et la culture avec le succès ou le profit.»[5]

   La connaissance sensible ne peut épuiser le mystère du réel. Le monde ne se réduit pas à une nécessité mécanique et universelle. «Le vrai monde n’est pas une mécanique. Le vrai monde est… le sacrement de sa présence, le don de son amour. Et c’est pourquoi le véritable savant, qui est un contemplatif, peut trouver dans le monde, dans les cailloux, dans les insectes, dans la matière et dans l’atome, … la joie de la rencontre parce que justement, le monde est plein de cette pensée et de cette tendresse divines.»[6]Dans le monde, il y a l’homme qui ne peut se réduire à une machine programmée. L’homme n’est pas uniquement un objet du monde, il est aussi un sujet capable de penser et d’aimer.

  À travers le voile de la matière, l’homme et Dieu peuvent se rencontrer. «Le monde est remis entre nos mains, … dans le monde comme en nous-mêmes, c’est Dieu qui nous est confié.»[7]Les réalités et les vérités extérieures ne seraient que non-sens en dehors du réseau de relations qui les détermine et qui leur donne vie. «La création n’est pas un pur objet sans signification, c’est parce que la création toute entière est le chant de son amour que nous ne pouvons entendre qu’en étant accordé à son amour, comme saint François quand il chante le cantique du soleil.» [8]

Silence

Texte de M.Zundel: L’ESPRIT DE PAIX

« Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l’adorent, l’adorent en esprit et en vérité ». […] Le Royaume de Dieu est au-dedans de nous. Toute la grandeur de l’homme tient dans cet appel. Il est esprit puisqu’il est capable d’adorer en esprit celui qui n’est qu’Esprit. Il est Esprit, c’est-à-dire qu’il peut s’affranchir de toute limite temporelle et spatiale. Non pas toutefois en méprisant la durée mobile et l’étendue divisible où son être physique est engagé, mais en faisant, du déploiement quantitatif et temporel, l’expression, le symbole et comme le sacrement de l’Esprit.

Tout le mystère de l’Art est là: extase de la matière dans l’ivresse de l’au-delà qui aimante son flux, en laissant… planer l’esprit.

(….)

L’homme ne se contente pas d’empoigner la matière avec ses mains; il veut aussi la saisir d’une étreinte sentimentale avec son cœur.

(….)

Quand la propriété…. rend inhumaine la vie d’un grand nombre, elle cesse d’être un droit, et peut devenir un crime. Alors il faut réviser les valeurs et opérer une nouvelle répartition. Qu’on m’entende bien, il ne s’agit pas de rendre ceux qui possèdent esclaves de leurs esclaves, pour recommencer les mêmes excès sous un autre nom;… l’humanité continuerait d’être inhumaine.

[…] Tant qu’il se trouve sur la terre un seul homme incapable de vivre humainement, c’est-à-dire privé malgré tous ses efforts du bien être nécessaire à son esprit… il y a là une injustice que nous avons tous le devoir de réparer.

Les patries… méritent d’être dans la mesure où elles procurent la perfection de la vie humaine. Elles ne sont éternelles qu’autant qu’elles servent l’éternel. (…) Il n’y a pas de traité qui tienne pour ou contre une nation qui s’oblige ou est obligée à une vie inhumaine.

Toutes les patries sont soumises à l’Esprit. C’est là leur gloire et leur suprême garantie, leur indépendance et leur commun patrimoine. Qu’elles rivalisent sans cesse pour le posséder mieux et le faire rayonner davantage: l’Esprit ne s’épuise point… c’est lui qui doit être leur arbitre… non dans des textes, mais dans une Présence aimée devant qui tout genou fléchit. […]

Nous avons tous péché. (….) C’est donc devant Dieu que tous, individus et peuples, doivent s’humilier, …et c’est seulement devant Lui qu’ils le peuvent […]

Tout deviendrait possible dans une atmosphère d’humilité. Il faut que tous cèdent à l’Esprit. Autrement l’Europe peut passer la main à l’Asie et signer la fin de la Chrétienté. Il ne faut pas chercher ailleurs les raisons de notre désarroi et les garanties de la paix. Nous avons péché contre l’Esprit, nous ne serons sauvés qu’en revenant à l’Esprit. […]

L’Évangile,… il faut redire au monde ce message d’amour et lui montrer la douceur du visage de fête du Christ-Jésus. […]

« Cherchez d’abord le Royaume de Dieu et sa justice, et le reste vous sera donné par surcroît ». Car la réalité humaine est esprit d’abord.

(Extraits de l’article de M.Zundel  paru dans le‘’Courrier de Genève »  le 7-11-1932)

Silence

Évangile selon saint Jean chap. 14,

08 Philippe lui dit: «Seigneur, montre-nous le Père; cela nous suffit.»

09 Jésus lui répond: «Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe! Celui qui m’a vu a vu le Père. Comment peux-tu dire: “Montre-nous le Père”?

10 Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi! Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même; le Père qui demeure en moi fait ses propres œuvres.

11 Croyez-moi: je suis dans le Père, et le Père est en moi; si vous ne me croyez pas, croyez du moins à cause des œuvres elles-mêmes.

12 Amen, amen, je vous le dis: celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais. Il en fera même de plus grandes, parce que je pars vers le Père,

13 et tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils.

14 Quand vous me demanderez quelque chose en mon nom, moi, je le ferai.

15 Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements.

16 Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous:

17 l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous. […]

25 Je vous parle ainsi, tant que je demeure avec vous;

26 mais le Défenseur, l’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit.

27 Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne. Que votre cœur ne soit pas bouleversé ni effrayé.

Silence

Questions pour lancer votre réflexion

  • Un mot ou un passage des textes proposés, vous frappe-t-il particulièrement?
  • Une expérience vécue en votre vie, de communion en Esprit avec d’autres, vous revient-elle en mémoire?

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[1]Cf § 1.1.2 et 1.1.3 “L’intériorité et l’altérité dans l’homme” et § 1.5.1.5 et 1.5.1.6 : “La connaissance nuptiale” et “la connaissance comme une naissance.”
[2]M. Zundel, Al, p. 74.
[3]Cf § 1.1.2 et 1.1.3 “L’intériorité et l’altérité dans l’homme” et § 1.5.1.5 et 1.5.1.6 : “La connaissance nuptiale” et “la connaissance comme une naissance.”
[4]M. Zundel, AL, p. 81.
[5]M. Zundel, brouillon d’une lettre à R. Habachi, Le Caire, 1943, p. 2.
[6]M. Zundel, SPV, p. 94.
[7]M. Zundel, SPV, p. 95.
[8]M. Zundel, SPV, p. 94.