C’est cela le vrai visage de Jésus-Christ. Chacun de nous est appelé à être le portrait de notre Seigneur. Le vrai visage de notre Seigneur, nul ne peut le connaître qui ne l’a pas vu se lever à travers une âme humaine, qui n’a pas assisté à cette résurrection d’un visage au plus profond de l’être, comme la lumière de l’éternel Amour.
Pour ceux qui ont la moindre tendresse envers notre Seigneur, ce doit être notre grande passion de découvrir le visage de Jésus-Christ, de le faire apparaître, de l’imprimer dans le cœur des autres, d’en faire la découverte à tous les tournants de la route. Quand on pense que Jésus est au milieu de nous, que la vie de Jésus est confiée à chacun de nous, que l’Évangile vivant nous est confié, l’on commence à sentir le prix de la vie et la joie de l’existence. Il y a quelque part une beauté infinie. Il y a quelque part toute une musique secrète et merveilleuse. Il ne s’agit que de découvrir cette source et chacun de nous peut faire, à chaque instant, cette découverte infinie.
Nous sommes tous plus ou moins un faisceau de résistance et d’obscurité. Il suffit qu’un regard de bonté nous enveloppe, qu’un sourire vienne à notre rencontre pour que tout change.
Dieu, comme il est réel, présent, intérieur à nous-mêmes, Jésus- Christ, comme il est facile de le rencontrer si l’on s’en donne la peine ! Ce portrait que les Anciens possédaient, comme il est à la portée de chacun de nous ! Comme il nous importe peu qu’il y ait quelque part une effigie morte alors qu’au milieu de nous, il y a le Christ vivant, que chacun de nous porte le portrait unique, irremplaçable de Jésus-Christ. Demandons à notre Seigneur de ne pas passer à côté de ces trésors.
Tous les peintres de la terre, tous les poètes, tous les musiciens, qu’ont‑ils fait d’autre que d’essayer de suggérer, de créer, à leur manière, ce visage éternel qui est le visage de notre Seigneur imprimé dans nos cœurs ? Tous les messages de l’âme s’adressent à nous parce qu’il y a dans chacun de nous une possibilité de réponse, parce que le regard sublime, secret, dans un tableau, un marbre, une cathédrale, c’est un être aimé qui se tient debout et qui, tout à coup, à travers lui‑même, laisse passer cette Présence et ce visage de Dieu.
Je connais une légende magnifique, mais qui est, plus encore, un programme pour chacun de nous. Être Véronique, oui, aller au devant des autres avec le voile du respect, du silence, de la tendresse, effacer dans le visage humain tout ce qui le défigure, tout ce qui l’empêche de resplendir et, tout à coup, voir devant soi le visage de Dieu. Il faut demander qu’il en soit ainsi et garder dans notre esprit, comme un programme, cette douce intention du Chemin de la Croix où Véronique, dans son amour, va au devant de notre Seigneur.
Ce voile de tendresse pour que s’imprime sur lui toute la bonté de son cœur, de son visage. Véronique… Être Véronique… Voir toute âme à tous les tournants de la route, en apportant aux autres cet Amour qui est Dieu. Il n’y a qu’un seul portrait authentique de Jésus Christ, c’est celui que nous apportons aujourd’hui aux autres en leur apportant notre confiance et notre respect, ce visage qu’ils retrouveront dans l’éternité.
Maurice Zundel, Le Caire août 1957
(Notes d’un auditeur non revues par L’auteur)